Protection d'un concept par une action en parasitisme

Dans le cadre de son mémoire de fin d'études, un stagiaire avait présenté son projet à la direction de la Société Générale au sein de laquelle il avait effectué son stage.

Ce projet consistait notamment en la création d'entreprise avec un système baptisé "Transcompte". Ce système avait vocation "à faciliter les transferts de fonds des étrangers, résidant en France, vers leur pays d'origine".

Peu de temps après, la Société Générale lançait le service "votre banque ici et là-bas" consistant en l'ouverture simultanée gratuite, à partir d'une agence en France, d'un compte en France et d'un compte dans le pays d'origine" permettant notamment "de procéder à des virements sur le compte du pays d'origine aux fins d'épargne".

En 2008, la Société Générale présentait la création d'agences dédiées comme une nouveauté.

Le stagiaire estimant que la Société Générale avait copié son concept décida de l'assigner pour parasitisme.

De manière générale, un concept peut être protégé à partir du moment où il est concrétisé, peu importe la forme d'expression du concept ou le support. Cette concrétisation est indispensable car une idée n'est pas protégeable, elle est de libre parcours.

Bien que le concept soit concrétisé, encore faut-il qu'il soit détaillé de manière précise.

En l'occurrence, il apparait que tel était le cas puisque les juges ont pu retenir que la Société Générale avait copié deux éléments nouveaux indiqués dans le projet du stagiaire.

Outre la concrétisation d'un concept, il faut savoir quel est le droit applicable au concept.

Un concept peut être protégé au titre du droit d'auteur, s'il est original (à ne pas confondre avec la nouveauté). A défaut, la protection par le droit commun (article 1382 du code civil) est possible à condition de pouvoir démontrer une faute, un préjudice et un lien entre les deux.

La faute de la Société Générale telle que retenue par la cour d'appel et confirmée par la Cour de cassation est caractérisée par le fait qu'elle a "repris et intégré, dans son offre de services aux étrangers, deux éléments innovants de ce concept, la création d'un "double compte" et celle d'agences dédiées".

La Cour de cassation juge notamment que :

"L'arrêt retient, par des motifs qui ne sont pas critiqués, que la valeur économique de l'emprunt de ces éléments par la Banque est établie".

Elle en déduit donc que le stagiaire qui n'a "tiré aucun profit du produit de ses recherches dont l'intérêt économique était réel et qu'il ne pouvait plus valoriser, avait subi un préjudice dont il devait être indemnisé".

La Cour de cassation confirme donc l'arrêt de la cour d'appel en ce qu'il a, notamment, condamné la Société Générale au paiement d'une somme de 80.000 € à titre de dommages-intérêts.

Cass.com. 31 mars 2015, n° pourvoi 14-21391

30.04.2015